Intégrer la notion de "patient partenaire" dans la formation des infirmiers et des aides-soignants

Je suis née avec un handicap moteur dit léger à modéré. Tout au long de mon parcours de soin, j’ai observé le milieu et les professionnels de la santé, ce qui m’a permis de construire ma propre identité de soignante : je suis devenue la soignante que j’aurais aimé avoir et que je souhaite être pour les autres.

J’ai commencé mon parcours de soignante en tant qu’agent de service hospitalier puis comme faisant fonction d’aide-soignante. J’ai ensuite suivi la formation en soins infirmiers sur le site Croix-Rouge Compétence Auvergne-Rhône-Alpes de Saint-Étienne. Après plusieurs années de service en tant qu’infirmière spécialisée en psychiatrie, mon état de santé m’a contrainte à une reconversion professionnelle et je suis devenue praticienne en thérapies alternatives libérale.

Je préfère employer le terme de patient partenaire car je travaille en collaboration avec différents acteurs de la santé.

Selon moi, un patient partenaire est une personne qui a acquis une expérience de vie à travers sa maladie. Cette personne témoigne auprès des professionnels de santé pour partager son expérience et ses savoirs et améliorer sa propre prise en charge. Plus un patient connaît sa maladie, plus il est acteur de ses soins. S’il le souhaite, ce patient peut aussi transmettre son savoir à d’autres patients pour les accompagner et les soutenir, ce que l’on appelle la pairémulation.

Dans un partenariat patient, le patient est considéré comme membre de l’équipe soignante. C’est pourquoi, dans le module d’enseignement que je conçois au sein de Croix-Rouge Compétence, nous expliquons aux futurs soignants comment se positionner et mettre permettre au patient de devenir davantage acteur de leur prise en charge

Mon premier objectif était de sensibiliser les professionnels de santé aux ruptures de soins. Je suis devenue patiente partenaire en collaborant avec les soignants qui m’accompagnent depuis toujours. On m’a ensuite proposé de plus en plus régulièrement de témoigner de mon parcours de patiente et de soignante.

A la demande de professionnels de santé, j’ai commencé à me déplacer pour rencontrer des patients et familles, notamment au sein de la Croix-Rouge française, au Centre médico-chirurgical de réadaptation des Massues, à Lyon. Désormais, les patients se rendent également à mon cabinet pour un soutien émotionnel et une gestion des douleurs grâce aux thérapies alternatives. Mon activité de patiente partenaire est aujourd’hui mon activité principale.

Avec les membres des équipes pédagogiques de Croix-Rouge Compétence à Saint-Étienne et à Lyon, nous développons pour la rentrée 2023 un programme pour intégrer la notion de patient partenaire au contenu des formations en soins infirmiers et aide-soignant.

Une quinzaine de notions clés transversales sont réparties dans les unités d’enseignement. Nous avons créé des cours ludiques, un questionnement vivant, simple et participatif de l’ordre de la découverte.

Pour que le patient prenne une place plus importante dans les parcours de soins, j’ai pris conscience qu’un changement des pratiques soignantes était nécessaire. Parler du partenariat patient dès l’enseignement initial des professionnels de santé permet de les imprégner de cette nouvelle culture, améliorer l’expérience patient et savoir accueillir les patients partenaires sur le terrain.

Dès la période de stage, nos étudiants pourront transmettre leurs connaissances sur le terrain et interroger les pratiques de leurs tuteurs pour susciter de la curiosité quant aux patients partenaires. Déployer des dispositifs pédagogiques permet d’actualiser les connaissances des soignants et d’acculturer en profondeur le système de santé.

Nous espérons un changement global des pratiques et de la place du patient, que l’on considère désormais comme détenteur d’un savoir. Cette nouvelle place du patient a selon nous une portée politique qui dépasse le cadre des soins et peut avoir un rôle dans la formation et la recherche médicale.